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Témoignages
DNA du 03 octobre 2016 : René Baumann, 71 ans après l’enfer
Le Hirsinguois René Baumann a connu, lors de la Seconde Guerre mondiale, un parcours terrifiant : déporté NN, il a été interné deux fois à Mauthausen, une fois au Struthof, une fois à Dachau et a suivi une « marche de la mort ». Il a survécu, s’est reconstruit et s’est armé d’un sourire inaltérable. Une professeure d’histoire vient de mettre sa vie par écrit.
Ils ont tout fait pour lui prendre son humanité. En échange, ils lui ont donné des numéros. Il est devenu un « Stück » , marqué de quatre matricules successifs : 64 094 à Mauthausen, 17 592 au Struthof, 100 688 à Dachau, 97 621 de nouveau à Mauthausen. En 19 mois, entre son arrestation dans les Alpes, en novembre 1943, et son retour à Hirsingue, en juin 1945, soit entre ses 20 et ses 22 ans, le Sundgauvien René Baumann est passé par une dizaine de lieux d’internement : prisons, casernes, camps annexes, camps de concentration ou d’extermination… En plus de ces numéros, il portait le triangle rouge des déportés politiques et était fiché NN. Pour Nacht und Nebel , Nuit et brouillard. Ce traitement de faveur était réservé aux opposants au Troisième Reich : il leur promettait de « disparaître sans laisser de traces » et sans qu’aucune information ne soit donnée sur leur sort.
Or, plus de 70 ans plus tard, René, 93 ans, est toujours là, dans les bureaux de la minoterie de Hirsingue. Là où il a toujours travaillé et là où il est né. Humble, discret, prévenant. Cet homme a connu l’enfer, subi la barbarie et il pratique la gentillesse. À ses côtés se trouve une jeune femme : Audrey Guilloteau, 34 ans. Elle est professeure d’histoire au lycée Henner d’Altkirch et elle vient de lui faire un cadeau formidable : un livre retraçant son parcours. Mais ce cadeau n’est pas une faveur : c’était la moindre des choses. Il fallait juste que René rencontre la bonne personne…
Trahi pour 800 francs
Cette rencontre s’est faite en 2013 dans le cadre du concours national de la Résistance et de la Déportation, dans lequel se sont distingués des élèves d’Audrey. Lors de voyages mémoriels, René a lâché des bribes de son parcours de déporté. « J’ai trouvé son histoire extraordinaire ! , se souvient Audrey. Et je me suis demandée pourquoi elle n’avait pas encore sa place dans les bibliothèques. » René n’attendait que ça… Alors l’ancien déporté et la jeune professeure se sont retrouvés à la minoterie, pendant deux heures, toutes les semaines, entre janvier et octobre 2015. Replonger dans de tels souvenirs fut-il douloureux ? « Non, non, je voyais Audrey avec joie ! » , assure René. « Avec lui, tout va toujours bien , constate l’historienne. Il ne se plaint jamais, il est toujours souriant… »
Ce sourire est une pudeur. Très longtemps, René n’a pas parlé, parce qu’il fallait se reconstruire et revivre en communauté, avec les voisins et les membres de sa famille qui avaient suivi des trajectoires et fait des choix différents. Mais depuis les années 2000, René intervient dans les établissements scolaires. « J’aime ce contact , dit-il. Mais je ne raconte pas facilement… »
Alors Audrey a dû insister, revenir incessamment sur les détails de ces enfers qui n’en finissaient pas. Elle a vérifié les faits, complété les souvenirs de René avec d’autres témoignages. Et elle a signé, au final, un livre complet, documenté et illustré, qui va au-delà d’un cas particulier pour raconter une histoire de l’Alsace dans le cataclysme de la Seconde Guerre.
Le drame de René débute avec cette décision cornélienne qu’ont dû prendre les jeunes hommes d’Alsace après août 1942 : fuir ou non l’incorporation de force. Cette décision se prenait avec les parents, concernés par les représailles en cas de fuite. Chez les Baumann, cette réunion se passe en octobre 1942. René vient à peine de rentrer du Reichsarbeitsdienst (RAD), qui fait office de préparation militaire à la Wehrmacht. « Mon père avait fait 14-18 dans l’armée allemande , raconte René. D’abord, il m’a dit : “C’est dur, mais il faut le faire !” Mais quand il a vu la mentalité des nazis, il a eu cette phrase : “Ce ne sont plus les mêmes Allemands…” » La décision est alors celle-ci : partir. René passe en Suisse le 11 octobre 1942, à 19 ans, avec deux camarades, Léon Specklin et Léon Sengelin. Il suit ensuite un parcours assez classique de réfractaire : celui-ci le mène en France, dans l’armée d’armistice d’abord, dans la Résistance ensuite. Mais il ne reviendra pas, comme beaucoup d’autres, en Alsace dans l’armée des libérateurs. La faute à un traître, qui a infiltré son réseau, dans les Hautes-Alpes. Audrey précise que ce Judas a reçu 800 francs de l’époque comme prix de sa trahison. Celle-ci aurait permis 80 arrestations. Les nazis ont sans doute fait une affaire…
Le remords du SS
Commence alors un parcours hallucinant dans le monde concentrationnaire. Le calvaire débute à Neue Bremm, « la Nouvelle Brême » , un camp de transit pour les détenus NN à Sarrebruck. « Dès mon entrée dans le camp , dit René dans le livre, j’ai le souffle coupé par une vision d’horreur : une horde de morts-vivants, presque des squelettes, tourne autour d’un bassin rectangulaire rempli d’une eau verdâtre… » Bienvenue en enfer. René y reste un mois, avant d’être envoyé à Mauthausen. « À 50 km de l’endroit où j’aurais dû me rendre si j’étais allé dans la Wehrmacht ! » Que faire face au destin ? Il découvre le travail criminel à la carrière, l’escalier démoniaque aux 186 marches. Deux mois plus tard, il apprend qu’on va le transférer en Alsace. Cette idée le « remplit de joie »… Il ne sait pas qu’on l’envoie au Struthof, où Himmler veut réunir tous les NN. Puis, devant l’avance alliée, passage par Dachau, en septembre 1944, et retour à Mauthausen et dans le camp annexe de Melk. Avant d’entamer, en avril 1945, une « marche de la mort » : un exode à pied sur des routes interminables qui achève les derniers survivants.
Tout ceci est raconté avec sobriété et précision. On nous parle des punaises et des poux, du problème des latrines, des cadavres, des phlegmons aux pieds, des morsures des chiens et de la faim, de la solidarité entre déportés… René raconte aussi ce fait rare : le remords d’un SS. Pendant la marche, il entend un nazi dire à un autre : « Je ne peux plus supporter tout ça : un jour, nous paierons pour ces crimes… » Et l’autre de répondre : « Si tu le redis une seule fois, je te dénonce ! »
Quand René retrouve enfin le Sundgau, dans les yeux de ses parents, l’effroi le dispute au bonheur. « Je pesais 76 kilos lors de mon arrestation, j’en faisais 28 à mon retour. » Il est rentré de l’enfer, mais il n’est pas sorti d’affaire. Il doit être hospitalisé avant de reprendre le cours de sa vie hirsinguoise : un travail à la minoterie, des engagements dans le club de football, chez les sapeurs-pompiers… En 1956, il épouse Hélène Schueller, qui lui donnera trois enfants. Pour leur voyage de noces, il l’emmène dans les Hautes-Alpes et… à Mauthausen. Il voulait sans doute lui montrer ce qu’il ne pouvait lui dire.
L’atout de la langue
Comment expliquer qu’il ait survécu à sa « disparition » programmée ? « J’étais en forme… » , répond René. On peut ajouter qu’il avait de la volonté, une nature optimiste, une grande chance dans son énorme malchance. Il avance encore une autre raison : « Je connaissais l’allemand, et ça, c’était primordial ! Je comprenais ce qui se disait et se passait, et je restais dans la masse, je ne me faisais pas voir… La vie, à quoi ça tient, hein ? Pas grand-chose… »
Dans le bureau hors d’âge de la minoterie de Hirsingue, René insiste pour ouvrir une bouteille de champagne avant de nous laisser repartir. On trinque alors, pour le plaisir de rencontrer un tel survivant. Comme un hymne à la vie. Un pied de nez aux barbares.
Journal l'Alsace du 25 mai 23
Jean-Pierre Tschaen, ancien incorporé de force : « Je n’ai plus de sentiment de revanche »
Jean-Pierre Tschaen a attendu la fin des années 2000 pour témoigner de son incorporation de force. Cet Alsacien originaire de Kaysersberg ne parlait pas de la guerre à ses proches. Ancien Waffen SS, engagé dans la 1re Armée française en décembre 1944, il regarde avec lucidité cette époque si complexe pour des Alsaciens dont le cœur battait français.Jean Bézard et Jean-Pierre Tschaen se sont connus grâce à une lettre que le premier avait envoyée au second il y a une quinzaine d’années. Le fondateur de la SNIFAM (solidarité normande avec les incorporés de force d’Alsace-Moselle) cherchait à l’époque la trace de deux incorporés de force qu’il avait croisés un jour de juillet 1944 à Gouville-sur-Mer, village posé au nord-ouest de Coutances en Normandie. Il adressait ce type de courrier aux Alsaciens qui avaient combattu dans sa région natale après le Débarquement. C’était le cas pour Jean-Pierre.Au sein d’une compagnie du régiment Deutschland rattaché à la division blindée Das Reich
Depuis cette première missive, une belle amitié est née entre les deux hommes. Et lorsque Jean Bézard et sa compagne, Nicole Aubert, posent chaque printemps leurs valises en Alsace, ils ne manquent pas d’aller voir à Ammerschwihr Jean-Pierre Tschaen, qui partage sa vie avec Suzanne Florence.
Rencontrer Jean-Pierre Tschaen, c’est se replonger dans un passé lointain, celui d’une Alsace occupée par les nazis. Originaire de Kaysersberg, le nonagénaire, à la mémoire intacte, raconte avec placidité cette époque de sa vie qui ne fut pas facile comme pour la plupart des jeunes de son âge. Lui est né en 1926, classe maudite qui fut en grande partie incorporée de force dans la Waffen SS. Jean-Pierre n’a pas échappé à ce funeste destin. Il a reçu son uniforme et son équipement en février 1944, en Prusse orientale, avant de retourner en France, au sud de Bordeaux où stationnait son unité, une compagnie du régiment Deutschland rattachée à la division blindée Das Reich.
Jean-Pierre était affecté à une section de transport. Le front, il l’a connu en Normandie. « C’est le seul moment où j’ai tiré un coup de fusil », se souvient-il. En août 1944, son unité est engagée dans une offensive qui vise à reprendre un village, Bourg-Saint-Léonard, dans l’Orne. « Elle était occupée par les Américains. C’était une sorte de verrou qu’il fallait faire sauter pour éviter un encerclement des troupes allemandes ». L’attaque est un succès pour les SS mais les Alliés déclenchent une contre-offensive durant laquelle Jean-Pierre évite de peu une blessure, une balle américaine effleurant son bras. « À ce moment-là, j’ai fait comme les autres, j’ai tiré. Mais une seule fois car mon fusil s’est enrayé ! »
C’est à Bourg-Saint-Léonard que Jean-Pierre est fait prisonnier. « Ce fut un drôle de sentiment. Je me sentais, pour ainsi dire, libéré ! » Captif pendant trois mois, le jeune alsacien va vivre dans plusieurs camps avant d’atterrir au Mans où il est regroupé avec d’autres incorporés de force. Il est libéré le 8 décembre 1944 et s’engage le lendemain dans l’armée française, dans un bataillon de marche puis au 3e régiment de hussards.
Face à la Résistance
Évoquer la Das Reich, c’est forcément aborder les exactions de cette division dans le centre et le sud de la France. Après le Débarquement, les régiments Deutschland et Der Führer de la Das Reich vont rester dans le sud afin de lutter contre la Résistance. Une lutte qui s’accompagne de massacres contre la population, en Haute-Garonne, en Ariège, dans le Lot, en Corrèze et Haute-Vienne. La compagnie de Jean-Pierre Tschaen a été engagée une fois dans la lutte contre la Résistance, début juin 1944. « Ma section était restée à l’arrière et avait pour mission de garder le cantonnement dans un village, du côté des Pyrénées. Le reste de la compagnie a lutté contre les maquisards. Je n’ai su que bien plus tard tous ces drames. Nous ne savions pas, par exemple, ce qui s’était passé à Oradour. Pour ma part, j’ai dû attendre le procès de Bordeaux [en 1953] pour en savoir plus ».
D’ailleurs, la guerre, on n’en parlait pas après 1945. « On était tellement heureux d’être vivant ! Personne, dans mon entourage, ne faisait d’allusion à mon incorporation dans la Waffen SS ».
La perte des amis sur le front
Il a longtemps attendu avant de témoigner. Son récit de guerre figure dans un ouvrage de Nicolas Mengus et André Hugel (*) datant de 2008. « Aujourd’hui, je ne ressens plus ce sentiment de revanche que j’avais à l’époque. Cette guerre, c’était une aventure ». Jean-Pierre garde cependant en mémoire ces images qui ont pu le poursuivre. « Une fois, j’ai dû enterrer des morts à Saint-Michel, dans la Manche. Les corps étaient bien mal en point. L’un avait le crâne arraché et l’autre le bas du corps en charpie. J’ai pu reconnaître deux Alsaciens, Ernest Schoeffolt et Jean Meyer, tous deux de Soufflenheim. Ça m’a fait un coup au moral. J’ai déposé des fleurs. Ce fut un moment terrible ».
D’après les recherches de Jean et Nicole, quelque 1 200 incorporés de force ont participé à la bataille de Normandie et au moins 300 y ont perdu la vie.
Elle reconnaît, 30 ans après, celui qui avait menacé son père
Suzanne a un caractère bien trempé. Pas le genre à se laisser marcher sur les pieds… même à 93 ans ! Celle qui partage la vie de Jean-Pierre Tschaen habitait, pendant la guerre, à la gare de Fréland que géraient ses parents, Ernest Graff et Anne Marie Schmitt. Suzanne se souvient bien de ces journées passées dans la cave durant l’offensive alliée dans les Vosges. Il fallait éviter les bombardements qui pouvaient être meurtriers. Malheureusement, son père en fera les frais, touché, courant décembre 44 par un éclat d’obus. « Il a été évacué à l’hôpital de Saint-Dié où il est resté deux mois mais nous n’étions pas au courant de son état de santé. On a passé Noël sans lui. Nous étions quatre, avec ma mère et mes deux petits frères ».
« Il vous manque plus que le casque, l’uniforme et le pistolet »
La guerre a rattrapé Suzanne, bien plus tard. Dans les années 70, sa fille cadette, Martine, reçoit à Ammerschwihr sa correspondante allemande. Les parents de cette dernière décident de lui rendre visite et sont invités par Suzanne et son mari, Martin Florence. « Lorsque j’ai vu cet homme sortir de sa Mercedes de couleur bleu clair - je n’oublierai jamais cette voiture -, je me suis dit que je le connaissais. Et plus je le regardais, plus les souvenirs revenaient ».
Le repas se déroule sans problème mais au moment du café, Suzanne demande à l’Allemand s’il connaît les Vosges. Il répond par l’affirmative et vante la beauté de la région. Puis c’est là que Suzanne le regarde droit dans les yeux et lui assène sèchement : « Il vous manque plus que le casque, l’uniforme et le pistolet ». Puis elle lui rappelle que durant la guerre il a tenu en joue son père. Cette scène, elle peut la décrire sans problème.
Durant l’hiver 44/45, la gare de Fréland était occupée par des Allemands. Les troupes d’occupation posent des mines antichars pour freiner l’avancée des Alliés qui se trouvent dans les Vosges et dans certaines vallées alsaciennes comme à Sainte-Marie-aux-Mines. « Un soir, cet homme déplie une carte de la région puis pointe son révolver sur mon père. Il exige qu’il lui montre les positions américaines ». Le père de Suzanne ne cède pas. Puis il essaye de calmer l’homme en lui proposant du schnaps. « L’Allemand lui a répondu d’accord mais il a fallu que mon père boive en premier car il avait peur d’être empoisonné ! »
Trente ans après, l’ancien sous-officier allemand, face au regard accusateur de Suzanne, a blêmi. « Il s’est senti mal mais il n’a rien dit. Le couple est de suite reparti avec leur fille ». Évidemment, la petite Martine n’a jamais été accueillie en Allemagne par cette famille.
(*) Entre deux fronts, les incorporés de force dans la Waffen SS , volume 2. Éditions Pierron, 2008. 25 euros.
Dans le journal l'Alsace
Un Malgré-nous malgré lui qui, à 96 ans, tient à faire perdurer la mémoire des 103 000 Alsaciens et 31 000 Mosellans contraints par un décret du 25 août 1942, d’effectuer leur service militaire dans l’armée allemande.
80 ans après, cette date résonne encore comme un coup de massue dans la mémoire de Louis Mutschler. Envoyés sur le front Russe, beaucoup ont fini au camp de Tambov et un tiers d’entre eux ne sont jamais revenus.
Beaucoup ont gardé le silence pendant des dizaines d’années
Il aura fallu attendre fin 1945 pour que les rescapés retrouvent leur terre natale. Le traumatisme face aux atrocités vécues étant tel que beaucoup ont gardé le silence pendant des dizaines d’années. Ce fut le cas de Louis Mutschler, qui depuis peu, a décidé de témoigner en posant ouvertement la question « Pourquoi nous a-t-on laissés à notre triste sort aussi longtemps ? ».
80 ans après, Louis Mutschler témoigne en mémoire des incorporés de force
Comme chaque 1er novembre à Hindisheim, la commune rend hommage aux victimes et disparus des conflits passés. Cette année, dans le cadre du 80e anniversaire des incorporés de force de la Seconde Guerre mondiale, Louis Mutschler a témoigné.
Louis Mutschler, un ancien Malgré-nous, a témoigné de l’enfer vécu et a souhaité que cela ne se reproduise plus jamais. Photo DNAIl se souvient de ce mois de janvier 1945 où il a été fait prisonnier par les Russes qui lui ont tout pris. Il a juste eu le temps de ramasser une photo de sa famille. Marchant avec de la neige jusqu’aux genoux et dans un froid glacial, il a été conduit avec ses compagnons d’infortune au camp de Wolkowisck.
« Vers le 10e jour, on a dû se contenter d’une à deux tranches de pain sec »
« Les 30 et 31 janvier étaient les deux jours des plus durs : beaucoup de prisonniers sont tombés dans la neige pour ne plus jamais se relever et ces morts remplissent la liste des disparus. Au camp, avec un camarade de Colmar, j’étais obligé d’apporter la soupe aux officiers allemands prisonniers comme nous. Au milieu d’une nuit, une grande fusillade éclata : c’était la nuit du 8 mai, la fin de la guerre. On nous a emmenés dans un camp de rassemblement pour être répartis. Le voyage devait durer une quinzaine de jours dans des wagons à bestiaux. Vers le 10e jour, on a dû se contenter d’une à deux tranches de pain sec, puis plus rien à se mettre sous la dent, uniquement un seau d’eau lors de nos arrêts en gare. Je me demande encore aujourd’hui comment je suis arrivé à faire les 5 km de la gare de Rada au camp 188. »
« Étant reconnu apte au travail, je faisais partie du commando du bois qui sortait dans la forêt couper du bois avec des outils préhistoriques et ramener ce bois au camp pour la cuisine. En août, j’ai eu le typhus. J’ai survécu en pensant à ma chère maman. Je n’avais pas le droit d’abandonner la lutte car j’avais un devoir envers ma famille qui m’attendait. Le 29 octobre 1945, je suis rentré à la maison pour apprendre la plus mauvaise nouvelle : la mort de ma maman. Cette nouvelle a ruiné toute ma joie du retour de l’enfer de la guerre et de la captivité. Cette guerre a coûté la vie à environ 55 millions d’êtres humains, hommes, femmes et malheureusement des enfants. Je lance un appel aux générations futures de tout faire pour sauver la terre et pour qu’une telle tragédie ne se reproduise plus jamais ».
À la cérémonie du 1er novembre
Les Hindisheimois sont venus nombreux, assister à la cérémonie durant laquelle un hommage a été rendu à deux compagnons de la Libération, Laure Diebold-Mutschler, secrétaire de Jean Moulin et Auguste Kirmann, né à Hindisheim, et dont une rue portera son nom. Les musiques patriotiques Le chant des partisans, la Marseillaise et L’hymne européen ont été interprétées par Musique Espérance Saint-Etienne.
Deux enfants, Diego et Hugo, ont lu les noms des 50 personnes originaires de Hindisheim et décédées ou disparues lors des deux dernières guerres mondiales et lors de la guerre d’Algérie. Après le dépôt de gerbes par les sapeurs-pompiers et Pascal Nothisen, premier magistrat de la commune, puis par les anciens combattants, la cérémonie s’est terminée par l’interprétation de la chanson Il faudra leur dire de Francis Cabrel par les enfants et les chorales, comme un appel à la tolérance et à l’espoir.
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